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Cynophobie : comprendre et vaincre la peur des chiens !

Un aboiement soudain, un chien qui s’approche un peu trop près, et c’est la panique. La cynophobie est souvent minimisée, mais elle peut avoir un impact considérable sur la vie quotidienne, limitant les déplacements, les interactions sociales, voire les activités de plein air. Heureusement, il est possible d’apprendre à surmonter cette peur. On fait le point avec Cédric Daudon, psychologue cognitiviste à Ajaccio.

Définition : qu’est-ce que la cynophobie ?

La cynophobie est sans doute la forme la plus courante de zoophobie. Issue du grec ancien : kyôn (κύων), qui signifie « chien », et phobos (φόβος), qui signifie « peur », elle désigne littéralement la peur intense et irrationnelle des chiens. « Il s’agit d’une phobie spécifique, qui se manifeste par une réaction disproportionnée face aux chiens, qu’ils soient présents physiquement, entendus (aboiements), dessinés ou même juste imaginés », indique Cédric Daudon. Et de préciser : « Cette peur peut aller d’un simple malaise à une véritable crise de panique. Sans oublier les comportements d’évitement : les personnes cynophobes évitent souvent les endroits où elles pourraient rencontrer un chien et modifient leurs trajets quotidiens pour ne pas en croiser ».

Quelle différence avec une peur classique ?

La phobie des chiens n’a rien à voir avec une appréhension légitime face à un chien de grande taille que l’on ne connaît pas, ou face à un petit chien qui a déjà mordu. Elle se caractérise par :

  • une peur excessive et incontrôlable, même en l’absence de danger réel ;
  • un évitement systématique des chiens et des lieux où ils pourraient être présents ;
  • d’intenses réactions physiologiques (palpitations, sueurs, tremblements, crises de panique) ;
  • une souffrance significative et un impact sur la vie quotidienne.

Origines : d’où vient la phobie des chiens ?

La cynophobie peut avoir plusieurs origines, qui varient d’une personne à l’autre. Vous trouverez ci-dessous un aperçu des causes possibles :

Traumatismes passés

Une des causes les plus fréquentes de cynophobie est une expérience traumatisante vécue dans la petite enfance ou dans l’enfance : une morsure de chien, un grognement ou un comportement agressif. De telles expériences peuvent engendrer une peur durable qui se transforme petit à petit en phobie. À noter : même des situations où la personne a eu peur sans que le chien soit menaçant (un gros chien qui court vers elle, par exemple), peuvent laisser une empreinte psychologique.

Apprentissage social

La phobie peut aussi se développer par mimétisme. Une personne peut développer une phobie en observant des proches qui manifestent une peur intense des chiens, sans avoir eu de mauvaise expérience personnelle. C’est ce qu’on appelle l’apprentissage vicarian : on développe une phobie en observant et en imitant le comportement de nos pairs.

Génétique et prédisposition biologique

Certaines personnes sont génétiquement plus susceptibles de développer des troubles anxieux, souligne Cédric Daudon. « Les personnes ayant une prédisposition aux troubles anxieux peuvent être plus enclines à développer des phobies spécifiques, dont la cynophobie », indique-t-il. Cela peut être dû à des déséquilibres chimiques dans le cerveau, notamment des niveaux anormaux de neurotransmetteurs liés à l’anxiété.

Environnement culturel ou familial

Les croyances culturelles et familiales peuvent aussi jouer un rôle dans la formation de la phobie. Par exemple, dans certaines cultures ou familles, les chiens peuvent être perçus comme des animaux dangereux ou sales, ce qui peut renforcer la peur de ces animaux. Lorsqu’un enfant grandit dans un environnement où les chiens sont perçus négativement, il développe forcément une appréhension qui se transforme parfois en peur irrationnelle.

Distorsions cognitives et renforcement par évitement

Certaines personnes développent une phobie des chiens à cause de distorsions cognitives, autrement dit, de biais de pensée. Elles peuvent avoir tendance à surévaluer les dangers des chiens, à généraliser une situation isolée ou à imaginer des scénarios catastrophiques impliquant des chiens extrêmement dangereux. Autant de pensées irrationnelles qui nourrissent et entretiennent la phobie… Par ailleurs, l’évitement peut renforcer la phobie sur le long terme. « C’est un mécanisme de défense qui soulage temporairement l’anxiété, mais renforce la phobie à long terme et empêche la personne de confronter sa peur de manière constructive », prévient Cédric Daudon.

Comment savoir si on souffre vraiment de cynophobie ?

Savoir si l’on souffre vraiment de cynophobie implique d’observer ses réactions émotionnelles et comportementales en présence de chiens, mais aussi d’évaluer l’impact de cette peur sur son quotidien. Découvrez les critères et symptômes qui peuvent vous aider à faire le point.

Quels sont les symptômes d’alerte ?

Une rencontre avec un chien, ou la simple anticipation d’une rencontre, peuvent être à l’origine :

  • De réactions émotionnelles intenses et irrationnelles. Vous ressentez un stress constant ou une anxiété anticipatoire, même lorsque vous ne croisez pas de chiens.
  • De réactions physiques liées à l’anxiété : des tremblements, une boule dans la gorge, une transpiration excessive, des palpitations cardiaques (accélération du rythme cardiaque), un essoufflement, des nausées ou des vertiges, une sensation d’étouffement ou de malaise, etc.
  • De difficultés à contrôler votre peur : vous avez conscience que votre peur est irrationnelle, mais vous angoissez quand même face à un chien, vos réactions émotionnelles et physiques restent hors de votre contrôle.
  • De l’évitement systématique des chiens dans les parcs, les rues, certains magasins, ou les maisons d’amis ayant un chien : vous changez de trajets, annulez des rendez-vous ou des sorties avec des amis ou des proches, etc.
  • De pensées irrationnelles et catastrophiques : vous avez tendance à croire que tous les chiens sont dangereux ou représentent une menace mortelle, à imaginer que les chiens vont forcément vous mordre ou vous attaquer, etc.
  • De tensions relationnelles : la phobie peut être mal comprise, créant des tensions ou des reproches. Vos proches peuvent être désorientés ou frustrés par votre peur et des conflits peuvent émerger, notamment s’ils ont un chien.
  • D’un sentiment d’isolement : votre peur interfère avec votre capacité à profiter de certaines activités ou lieux et vous vous sentez confiné ou limité dans vos activités sociales en raison de votre phobie.

Comment poser un diagnostic ?

Vous vous reconnaissez dans ces symptômes ? Vous souffrez peut-être de cynophobie. Toutefois, un diagnostic précis doit être posé par un professionnel qui pourra vous poser des questions plus approfondies, évaluer l’intensité de vos symptômes, exclure d’autres troubles associés et vous proposer une prise en charge adaptée.

Solutions et traitement : comment vaincre cette peur incontrôlable des chiens ?

Comme le souligne Cédric Daudon, la cynophobie n’est pas une fatalité ! Avec les bonnes approches, il est possible de surmonter cette peur et de retrouver une relation plus apaisée avec les chiens. Plusieurs solutions thérapeutiques existent pour aider les personnes atteintes de cette phobie à progressivement atténuer leur angoisse et à reprendre confiance : 

Thérapie Cognitivo-Comportementale (TCC)

La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est l’une des méthodes les plus efficaces pour traiter la cynophobie. Elle repose sur plusieurs étapes clés :

  • l’identification des croyances irrationnelles ;
  • la restructuration cognitive, autrement dit, le fait de remplacer progressivement ces croyances par des pensées plus réalistes et rationnelles ;
  • l’exposition progressive à des images de chiens, puis à des enregistrements sonores de leurs aboiements, avant d’en observer à distance et, petit à petit, d’interagir avec eux en douceur.

Une alternative moderne à cette approche est la thérapie d’exposition en réalité virtuelle, qui permet aux patients d’affronter leur peur dans un environnement totalement sécurisé. Grâce à des lunettes de réalité virtuelle, ils peuvent évoluer dans un parc virtuel avec des chiens et apprendre à gérer leurs réactions émotionnelles avant un contact réel.

L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing)

« L’EMDR est une méthode particulièrement efficace lorsque la cynophobie est liée à un traumatisme passé (une morsure de chien dans l’enfance, par exemple). Cette technique repose sur des mouvements oculaires, des sons alternés ou des tapotements dirigés par un thérapeute, permettant au cerveau de « retraiter » les souvenirs traumatiques et d’en diminuer progressivement l’impact émotionnel », explique Cédric Daudon. Elle permet de se libérer rapidement de la peur persistante et de retrouver un sentiment de sécurité », explique Cédric Daudon.

La thérapie par l’hypnose (hypnothérapie)

L’hypnose est une autre option intéressante pour atténuer la cynophobie. En accédant à l’inconscient, elle permet de reprogrammer les réactions de peur face aux chiens. Le thérapeute guide le patient vers un état de relaxation profonde, où il devient plus réceptif aux suggestions positives, aidant ainsi à modifier les schémas de pensée liés à la phobie. Avec le temps, le patient apprend à remplacer ses réactions paniques par des réponses plus apaisées.

Médicaments et traitements pharmacologiques

Des anxiolytiques ou les antidépresseurs peuvent parfois être prescrits temporairement pour réduire l’anxiété. Ces traitements ne constituent pas une solution définitive, mais un soutien ponctuel pour accompagner un travail thérapeutique en profondeur.

Auto-assistance et gestion de l’anxiété

Des techniques simples mais efficaces peuvent aider à gérer l’anxiété en présence de chiens :

  • La respiration profonde : elle aide à ralentir le rythme cardiaque et à calmer le système nerveux en cas de panique.
  • La relaxation musculaire progressive : cette technique consiste à contracter puis relâcher progressivement chaque groupe musculaire pour réduire la tension corporelle associée à la peur.
  • La pleine conscience (mindfulness) : apprendre à observer ses pensées et ses émotions sans y réagir immédiatement peut aider à mieux gérer la peur et à éviter les réactions excessives.

Éducation et zoothérapie

Comprendre le comportement canin est essentiel pour réduire l’angoisse. Apprendre à lire le langage corporel des chiens permet de distinguer un animal menaçant d’un chien amical, ce qui aide à retrouver un sentiment de contrôle rassurant, assure Cédric Daudon. Certains éducateurs canins proposent également des stages de désensibilisation, supervisés par des psychologues. Ils permettent aux participants qui le souhaitent d’apprendre à interagir progressivement avec des chiens bien dressés et équilibrés. Ces expériences, souvent en groupe, permettent de reprendre confiance en présence des animaux et de réajuster ses perceptions. 

En résumé, la cynophobie est une peur irrationnelle, mais surmontable. Il est possible de la dépasser avec un accompagnement adapté, et de retrouver une vie plus sereine. L’essentiel est de s’entourer de professionnels compétents et d’adopter une démarche progressive, en faisant preuve de patience, de bienveillance envers soi-même et de persévérance. Chaque avancée, aussi petite soit-elle, est un pas de plus vers une liberté retrouvée !

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.