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Délires passionnels : symptômes, causes et solutions pour en sortir

Les délires passionnels regroupent plusieurs formes de délires marqués par des croyances irrationnelles liées à l’amour, la jalousie ou l’attachement obsessionnel. Ces troubles délirants peuvent se manifester de différentes manières, sous forme de délire érotomaniaque, de jalousie pathologique ou de persécution passionnelle, toutes ayant en commun une altération profonde de la perception de la réalité. Comme nous l’explique Lilit Abrahamyan Empson, psychiatre à la Faculté de biologie et médecine de l’Université de Lausanne (UNIL), ces obsessions affectent gravement la vie quotidienne et les relations des personnes concernées.

Définition : qu’est-ce que le délire passionnel ?

Le délire passionnel fait référence à un ensemble de délires qui partagent une caractéristique commune : l’intensité émotionnelle et passionnée. Il se manifeste par des croyances irrationnelles liées à des thèmes tels que le désir, l’attachement ou l’amour. « Ce terme est surtout utilisé dans la tradition psychiatrique française pour regrouper le délire érotomaniaque, le délire de jalousie et le délire de persécution passionnelle », précise la Dre Abrahamyan Empson.

Quels sont les différents types de délires passionnels ?

Le délire érotomaniaque

Le délire érotomaniaque repose sur la conviction irrationnelle qu’une autre personne, souvent une figure publique ou un proche, est amoureuse de soi. La personne délirante interprète des gestes anodins, comme un sourire, un regard ou les paroles d’une chanson, comme des preuves d’amour. À noter : cette croyance persiste en dépit des preuves du contraire et des démentis, et peut évoluer vers des comportements intrusifs tels que le harcèlement.

Le délire de persécution passionnelle

Le délire de persécution passionnelle repose sur la conviction irrationnelle d’être la cible d’une obsession malveillante, exercée par une personne ou un groupe. La personne délirante a peur d’être manipulée et lésée, elle interprète des événements banals comme des menaces et développe une méfiance intense, parfois accompagnée de comportements défensifs ou agressifs.

Le délire de jalousie pathologique

Le délire de jalousie pathologique repose sur la conviction irrationnelle d’être trompé(e) par son partenaire, malgré l’absence de preuves. La personne délirante devient suspicieuse, surveille et questionne constamment son partenaire, ce qui génère des tensions dans la relation et peut mener à des comportements possessifs ou agressifs.

Ces différentes formes de délires passionnels partagent la même dynamique intense, mais se distinguent par les objets ou les personnes concernées, ainsi que par les émotions ou les sentiments sous-jacents (amour, jalousie, désir, persécution, etc.), souligne la Dre Abrahamyan Empson.

Délire passionnel : quels signes doivent alerter ?

Une personne souffrant de délire passionnel présente forcément un ou plusieurs des symptômes suivants :

  • La conviction irréaliste d’une relation amoureuse partagée. La personne est persuadée d’avoir une relation amoureuse avec quelqu’un, même si cette personne ne partage aucun sentiment et ne montre aucun intérêt pour elle. Cela peut concerner une célébrité ou une personne qu’elle connaît vaguement.
  • Des comportements obsessionnels et intrusifs. La personne adopte des comportements obsessionnels pour tenter d’attirer l’attention de l’objet de leur obsession. Cela inclut des tentatives répétées de contact (appels, messages, lettres), une présence excessive sur les réseaux sociaux, ou même des gestes plus intrusifs comme des visites imprévues ou l’envoi de cadeaux non sollicités.
  • Des interprétations déformées. La personne peut mal interpréter ou surinterpréter des gestes anodins ou certaines paroles. Un simple regard ou une remarque banale peuvent par exemple être perçus comme une preuve d’amour ou d’intérêt réciproque.
  • Retentissement quotidien. La personne concernée se concentre exclusivement sur ses idées obsessionnelles et ignore souvent les préoccupations de ses proches, convaincue qu’ils ne comprennent pas sa situation.
  • Des comportements possessifs ou de contrôle. La personne peut devenir excessivement contrôlante, cherchant à savoir où se trouve son partenaire à tout moment, surveillant ses activités ou même tentant de manipuler la situation pour que l’autre personne se rapproche d’elle.
  • La présence d’autres symptômes psychotiques. Le délire passionnel peut être associé à d’autres symptômes psychotiques, comme des hallucinations (auditives, olfactives, etc.), ou des symptômes maniaco-dépressifs. Ces symptômes peuvent amplifier l’impact comportemental de ce type de délires.
  • Des comportements dangereux. Le délire passionnel peut parfois entraîner des comportements risqués, comme forcer une rencontre avec l’objet de la passion ou prendre des décisions impulsives. Cela peut même aboutir à des actes de violence ou de harcèlement.
  • Un manque d’autocritique et de remise en question. La personne délirante a souvent du mal à se remettre en question et peut devenir agressive si on lui suggère que ses croyances sont erronées.

Ces signes doivent être pris au sérieux. Une prise en charge rapide limite les souffrances psychologiques et d’éventuelles conséquences judiciaires. 

Quels facteurs peuvent favoriser le développement de ces types de délires ?

Il s’agit de phénomènes complexes qui résultent généralement d’une combinaison de facteurs neurobiologiques, psychologiques et environnementaux. Son installation peut être insidieuse ou aigüe, déclenchée par un stress excessif, un traumatisme (deuil, rupture amoureuse, etc.) ou une vulnérabilité psychologique préexistante. Un autre facteur favorisant : la pré-existence d’un trouble psychiatrique, comme un trouble grave de l’humeur, un trouble psychotique ou un trouble neurodégénératif. 

Traitement : comment prendre en charge les délires passionnels ?

La prise en charge des délires passionnels nécessite une approche pluridisciplinaire et personnalisée. L’objectif est de limiter les symptômes délirants, d’améliorer la qualité de vie du patient et de traiter les causes sous-jacentes du délire. Les principales stratégies de traitement sont les suivantes :

Traitement médicamenteux

Les médicaments sont souvent indispensables : ils permettent l’amendement, à défaut de stabiliser les idées délirantes, et réduisent leur impact comportemental.

  • Des antipsychotiques atypiques sont souvent privilégiés, car ils ont un meilleur profil d’effets secondaires.
  • Des antidépresseurs et des stabilisateurs de l’humeur peuvent aussi être nécessaires si ces idées délirantes sont liées à un trouble dépressif majeur ou à un trouble bipolaire.

Un suivi psychiatrique régulier permet vérifier que le traitement est efficace et que la personne ne présente pas d’effets secondaires indésirables. Il permet également de gérer les phases de décompensation et d’ajuster la médication, si besoin.

Psychothérapies

Les psychothérapies, entre autres les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) sont généralement un outil clé pour traiter les troubles psychotiques. Elle permet de déconstruire progressivement les pensées délirantes et de mieux gérer les troubles du comportement associés.

La thérapie de soutien, elle, se concentre sur l’écoute et la validation des émotions tout en confrontant la personne souffrante au caractère irrationnel de ses croyances et à leurs conséquences. 

À noter : des techniques de relaxation, telles que la méditation, le yoga ou les exercices de respiration, peuvent aider à réduire l’anxiété et à améliorer le bien-être émotionnel général. Elles peuvent aussi favoriser la gestion des émotions et prévenir les pensées obsessionnelles.

Soutien familial et social

Le soutien de la famille et des proches est essentiel. Des séances de psychoéducation peuvent aider les membres de la famille à comprendre la nature des difficultés et à mieux gérer les situations conflictuelles ou les comportements envahissants.

Par ailleurs, dans certaines situations, encourager la personne délirante à rejoindre un groupe de soutien ou à s’investir dans des activités de groupe peut l’aider à sortir de l’isolement et à mieux gérer ses émotions. « La réintégration sociale est une composante clé pour éviter la réactivation des symptômes », rappelle la Dre Abrahamyan Empson.

Hospitalisation (si nécessaire)

Une hospitalisation peut être nécessaire dans les cas les plus graves : lorsque les symptômes sont particulièrement perturbateurs ou dangereux (par exemple, en cas de comportements agressifs, de tentatives de harcèlement ou de risque suicidaire). Elle permet de stabiliser la situation, de protéger la personne et d’entamer un traitement intensif sous surveillance.

Si vous ou un de vos proches présentez des symptômes similaires, n’hésitez pas à consulter un professionnel pour obtenir une évaluation et des conseils adaptés. La santé mentale est tout aussi importante que la santé physique et ne doit jamais être négligée !

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.